JOURNAL   Saison 9

EN THERAPIE INTENSIVE « FRIENDS »

« Vous êtes très charismatique, on voit tout de suite que vous êtes une leader, la boss, quoi ! »

Ah. Alors pourquoi j’aspire justement à ne plus l’être ?

 

Mercredi 3 mars 2021 # BIENTÔT LE PRINTEMPS ??? J-18

Hier, atelier Pôle Emploi « vérification des pistes d’emploi/plan d’action/stratégie gagnante »

Mais bien sûr. Je n’ai jamais été plus paumée que depuis que j’ai fait tous les tests proposés, dont le fameux RIASEC qui, pour la faire courte, dit que je suis majoritairement Artiste et que je devrais penser au métier de journaliste. C’est vaste. Passer sur BFMTV ou écrire des chroniques dans Marie-Claire, pas mon truc.

Bref. Entre mes compétences, mes aspirations, ma motivation défaillante, ce pour quoi je semble être faite et ce qui m’intéresse, je ne m’y retrouve pas. Tout se contredit et s’entrechoque, ça donne une cacophonie assourdissante qui me tue à petit feu. Je me mets des freins à tout. Je viens de comprendre ça. J’avance à tâtons et je freine des quatre fers, normal que je fasse du sur place.

Le grand retour de la chépattitude.

Cependant, il semble se distinguer une récurrence : j’ai envie de devenir une experte, une spécialiste, une incontournable. En quoi, telle est la question. J’ai bien un truc qui me trotte dans la tête depuis quelques temps déjà mais j’attends, je crois, l’illumination, le déclic. Je me laisse aussi découvrir un truc auquel je n’aurais pas pensé, histoire d’avoir des éléments de comparaison.

Et ce qui n’était jusqu’à maintenant qu’à l’état embryonnaire dans ma tête a fait jour en moi de façon complètement inopinée bah… ce matin, au lendemain d’une prise de tête majeure avec Bradley. Un rapport cause à effet assez bizarre, je dois dire.

Donc, Bradley est rentré de mission le week-end dernier et est chez moi depuis dimanche soir. Je ne savais pas trop ce que cela allait donner mais je dois avouer que j’étais quand même assez heureuse de le revoir. Mais hormis dimanche soir où l’on a passé un très bon moment, dès lundi matin, j’ai su que cela allait tourner au vinaigre. Je me suis d’ailleurs mordu les lèvres à plusieurs reprises pour ne pas l’envoyer paître et lui dire le fond de ma pensée :

« On ne s’est pas vus depuis presque trois semaines, on ne va pas se voir pendant un bon mois à partir de samedi et tu m’envoies balader parce que j’aimerais avoir vingt minutes avec toi pour déjeuner ?!! Et toute cette semaine, on se verra éventuellement le soir tellement tu es débordé ?!! Bah reste chez toi et restes-y. »

Il s’est pris la tronche aussi méchamment au téléphone avec son ex-femme au sujet de la garde des enfants. Je ne l’entendais pas, elle, mais la retranscription que j’en ai eue me fait penser qu’elle ne doit pas être très finaude. Mais lui, je l’ai entendu aboyer. Vindicatif, confus, indigeste, avec de grands principes creux et déconnectés de la réalité. A nouveau, j’ai pensé à leurs enfants mais je me suis bien gardée d’intervenir de quelque manière que ce soit. Et cela m’a confortée dans ce que je pense, à savoir qu’il est comme ça avec tout le monde, pas qu’avec moi.

Bref, j’ai tempéré. Il faut dire que depuis quelques temps, je suis sous perfusion de ce que je qualifie comme étant le meilleur remède à ma morosité, c’est-à-dire sous perf de ‘Friends’ que je regarde à la chaîne. Je me marre comme une baleine et leur joyeuse frivolité me gagne. J’en viens même à copier leurs réparties et leur humour, moi l’hybride Monica/Phoebe. Du coup, je souris tout le temps.

Jusqu’à hier soir. Je ne sais pas trop comment c’est parti ni trop ce qu’on s’est dit, enfin, jeté au visage, Bradley et moi, mais toujours est-il que je me suis couchée en pleurant avec un mal de chien au fond de moi. L’alcool, en doses relativement modestes pour une fois, n’était même pas en cause. Je ne sais plus, je crois que j’ai dû vouloir lui faire constater qu’il n’avait pas besoin de moi dans sa vie, ce qu’il a confirmé.

Et je me suis levée ce matin étrangement calme et apaisée. Tout m’est alors apparu limpide, comme si notre violente querelle de la veille était le point d’exclamation final dont j’avais besoin pour accepter ce que je sais au fond de moi depuis le début : lui et moi n’avons pas d’avenir ensemble.

J’ai perdu mon sourire dans la bataille, voire ma parole, juste le minimum syndical. Il a bien senti que quelque chose n’allait pas ou peut-être voulait-il juste revenir sur hier soir pour dépassionner notre débat houleux mais je n’ai pas souhaité en reparler alors j’ai pirouetté. D’ailleurs, je ne sais pas s’il y a matière à débattre le bout de gras plus avant et je n’en vois pas la finalité. Je me dis qu’il va repartir pour un mois, c’est bien, ça se délitera tout seul.

Bref. Donc, pour en revenir à l’embryon de projet professionnel qui a percé à jour ce matin, il s’agit d’une formation sur SAP, si possible les modules en Material Management, Sales and Distribution, Finance and Controlling…

Je sais, c’est bizarre. J’ai déjà bossé dessus et j’aurais bien aimé me former d’avantage à l’époque. Je me dis que c’est l’occasion ou jamais. Et cerise sur le pompon, quand on est expert SAP, le boulot, c’est pas ce qui manque, en France comme à l’international, mon rêve. Et je vais faire une VAE avant, une Validation des Acquis par l’Expérience, histoire de me revendiquer enfin BAC+2, moi l’autodidacte sans diplôme.

J’ai donc passé la matinée là-dessus. Je suis décidée. C’est dans le but d’un boulot certes alimentaire mais qui m’intéresse vraiment. Je suis libre comme l’air, je n’ai aucun bagage, je peux rester sur Paris, aller en province et même à l’étranger, tout me sera possible.

Allez hop, c’est parti.

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