JOURNAL   Saison 11

PAS DE LOMBRIC AU MENU

« Je n’ai pas du tout apprécié ton email. Je trouve que tu y vas un peu fort dans les insultes. Surtout, pas un moment tu t’es mise à ma place ! Qui est égocentrique, hein ? Et je ne t’ai pas demandé que tu passes tout ton week-end sur mon déménagement, je n’ai qu’un coup de fil à passer et j’ai un camion et des bras au départ et à l’arrivée. Si c’est pour en faire un tel patacaisse, je préfère me débrouiller seul. Donc non, on n’est pas si connectés que ça, finalement. »

Bradley en train de me beugler dessus hier soir à 23.25.

Mardi 18 mai 2021 # BALADE AUTORISEE AU-DELA DE 10km MAIS AVANT 19.00  J+16

Sa mauvaise foi, son interprétation de traviole et le fait qu’il n’avait donc pas besoin de moi m’ont faite brûler d’envie de lui raccrocher au nez. Mais les deux grammes d’alcool dont j’étais imprégnée à l’issue de mon apéro-geek avec Yang n’ont pu que me faire psalmodier des ‘OK’ bien monocordes.

La volée de bois vert passée, on a pu à peu près se parler comme des gens civilisés. Mais là aussi, mon alcoolémie avancée a tout passé à la moulinette. Et de la bouillie informe que sont mes souvenirs de notre conversation, j’en ai retiré ces quelques gros morceaux :

  1. Il passe ce soir, même si je n’en vois plus la finalité.
  2. Tous ses week-ends sont bookés, aucune possibilité d’escapade à deux comme je l’avais espéré et dont je voulais parler ce soir. Bis repetita de l’inutilité de sa venue ce soir.
  3. Son unique semaine de libre fin juillet au retour de sa grande mission dont il avait émis le souhait fût un temps d’en faire une semaine de vacances à deux pour me dire quelques temps plus tard qu’il l’envisageait en fait à deux mais dans sa maison à faire des travaux, doit m’être confirmée sous peu pour que je puisse poser mes CP au boulot mais si et seulement si c’est pour partir en vacances en amoureux parce que sa semaine de travaux, je m’en brosse le coquillard.

Et maintenant que je décante, je me rends compte que l’on n’aura jamais lui et moi ces instants privilégiés en amoureux qui sont à mon sens primordiaux pour contrebalancer le prosaïsme dont peut souffrir le quotidien d’une vie de couple. Sans les rendre omniprésents, ils doivent cependant exister. Et là, j’ai l’impression que cela ne sera jamais le cas.

C’est comme si on avait tiré un grand trait d’union de 20 ans entre nos deux histoires. Notre couple a repris sa course comme si de rien n’était avec son train-train, ses vicissitudes. Mais l’on a changé, j’ai changé. Et celle que j’étais alors n’a plus rien à voir avec celle que je suis aujourd’hui.

L’oiseau sur sa branche ne regarde certes pas plus loin que le bout de son bec mais s’il n’a que des graines de millet à se mettre dans le cornet tous les jours, il aura peut-être envie d’un bon lombric bien juteux de temps à autres pour faire passer la sobriété des graminées…

Bref. Plus ça avance et plus je recule. Je l’aime, ce Bradley, moins hier okay, et même s’il nous faudrait une bonne mise au point, il en faudrait peu pour que je m’engage vraiment auprès de lui, que je me sente investie. Que je descende de ma branche, quoi.

Là, je suis quasiment prête à m’envoler à tire-d’aile.

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