Saison 1

COVID OR NOT COVID ?

Jeudi 7 mai 2020 – CONFINEMENT J+52

Je me réveille en sursaut à 6.21 ce matin, quelque chose me tarabuste… A force de regarder House M.D, ça donne des idées. Comme des symptômes cachant d’autres symptômes. Et si ma mère avait le corona virus ?

Ça fait un mois à peu près que toutes ses analyses sont parties en sucette, ça fait un mois qu’elle se plaint de sa léthargie, de sa grande apathie, de courbatures, de douleurs, qu’elle tousse, qu’elle est essoufflée rien qu’à se lever de son fauteuil, qu’elle a le nez qui coule, des diarrhées, la perte de goût… Tout pointe vers le corona sauf… la fièvre qu’elle n’a absolument pas, c’est d’ailleurs pour cela que je ne me suis pas affolée, mettant tous ces troubles sur le compte de sa maladie qui s’aggravait.

Donc me voilà sur mon ordi à 6.32 à chercher si des cas de corona sans fièvre sont possibles. Comme il s’avère que oui, j’attends l’infirmière qui doit venir faire la prise de sang hebdomadaire de ma mère. Elle confirme et me dit que sur ordonnance de son médecin, elle pourra venir faire un test sans problème.

Ce qui est curieux, c’est que moi, je n’ai aucun symptôme, que dalle. Bref, j’appelle la doctoresse qui me fait l’ordonnance pour mardi. Si ma mère a bien le covid, je trouve que c’est, toutes proportions gardées, une bonne nouvelle car tout s’inverse : ce n’est plus le début de la fin, au contraire, c’est la preuve que son organisme se bat contre le virus et que par la suite surtout, elle ira mieux et sera immunisée.

Du coup, j’ai envie de me coller des baffes. Ma culpabilité refait surface.

Bon, on attend les résultats de ce test qui, cela dit, pourra être négatif car si ça se trouve, le virus est déjà parti de ma mère dont l’organisme peine à cicatriser depuis. Dans ce cas-là, il n’y aura aucun moyen de savoir si c’était le corona ou l’aggravation de sa maladie.

Mais moi, je veux croire qu’elle est forte et qu’elle va écrabouiller ce virus, qu’elle va lui faire un beau doigt d’honneur en lui survivant. C’est bizarre mais je me sens comme soulagée, je retrouve même mon âme de battante et mon positivisme.

Sur ce, je vais chercher les masques distribués gratuitement au gymnase d’à-côté avec mon petit formulaire d’inscription reçu de Monsieur le Maire par email il y a deux jours.

11.10. Un texto de Walter : « J’aimerais passer chez toi après le déconfinement, le jour que tu veux. »

J’aimerais tant y croire. Allez, je suis de bonne humeur aujourd’hui, je réponds : « Whenever you are ready. » Même si je sais comment ça va se passer. Dès lundi, je vais attendre un signe de lui qui n’arrivera pas et peut-être une semaine après, un bref texto me demandant pardon. Et rebelote dans un mois ou deux.

Et ce n’est pas sa réponse « I am. » qui me conforte. En fait, elle me fait aussi mal qu’elle m’emplit de joie. Et me revoilà, pour la dix-millième fois, en train d’espérer, d’essayer d’imaginer notre entrevue et de me préparer dans le même temps à être déçue.

Il dit être prêt, mais prêt à quoi ? J’ai à nouveau tendu le bâton pour me faire battre. Et moi, suis-je prête pour cette chose, quel qu’elle soit ? Se voir, d’accord mais qu’en découlera-t-il ?

Qu’est-ce qu’il en attend ? Qu’est-ce que j’en attends ? Est-ce le point de départ pour concrétiser notre histoire ? Même si j’ai envie de crier que c’est cela que je veux, suis-je capable d’effacer mon ressentiment ? M’en reste-t-il, d’ailleurs ?

Mais il y a cette petite voix au fond de moi, fluette mais têtue, qui me perturbe au plus haut point. Elle me souffle quelque chose que j’ai envie de croire mais que j’essaye d’éluder de toutes mes forces. Elle me dit que cette fois, ce sera différent…

Bref, ça me fait mal au coeur. J’y suis habituée, pourtant.

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